Suite tout d'abord d'ici et plus récemment d'ici...


Je viendrai, c'est évident, je ne manquerais cela pour rien au monde.
Je souris déjà à t'imaginer. Tu auras la robe la plus blanche et la plus fournie en dentelles qu'il t'aura été possible de trouver. Et sur toi elle n'aura pas le ridicule qu'elle aurait à m'approcher ; sur toi elle ira, resplendira.
Vous formerez l'un des plus beaux couples qu'il est permis d'imaginer. Toi mince et douce, impeccablement maquillée, coulée dans une robe imaginée, adaptée au millimètre près. Je n'ai pas oublié cette couturière parmi tes amies, à qui tu envisageais déjà de proposer tes projets.

Et que dire de ton homme, le sportif devant l'éternel, à la carrure étonnante !
Tu m'avais raconté ton étonnement ravi, la première fois dans ses bras et son lit. J'avais souris et pensé qu'il gagnait des points, par sa taille et sa carrure. Non point tant pour l'aspect recherché, même si tu m'avouais ta fierté quand les filles se retournaient sur son passage.
Mais ce n'était pas tant la beauté qui te plaisait, que cette impression de force qui te rassurait. Tu aimais te blottir dans ses bras, tu me disais avoir l'impression là que plus rien ne pourrait t'atteindre vraiment.

Je souriais, je comprenais, ton besoin d'être entourée, rassurée, protégée.

Entourée de ceux qui t'aimaient. Notre rencontre au bout du monde avait bien témoigné de ce besoin qui te pesait dans l'exil de nos entourages respectifs. Tu m'avais ouvert vite et loin les portes de tes rêves et tes désirs, rattrapant ainsi le temps qui nous manquait pour être intimes.

Rassurée sur ce que tu valais. Tu m'évoquais souvent tes craintes et tes doutes sur la qualité des travaux que tu rendais, sur tes chances et l'avis de ceux que tu rencontrais.
Rassurée, aussi, sur tes capacités, ta féminité. Combien de fois t'étais-tu surprise à draguer, juste pour confirmer que cela marchait ?

J'en ai fait les frais parfois, quand tu m'ôtais sous le nez l'attention d'un type avec qui je flirtais. Vrai que je ne pouvais pas lutter ! Tu finissais par le monopoliser et je vous observais, ravalant rapidement ce qui n'était même pas de la rancoeur. Un certain amusement plutôt, tant je me fichais bien du dragueur et connaissait en revanche tes besoins et tes peurs. Je trouverais d'autres histoires ou m'en passerai aussi bien comme le plus souvent en ces soirs.

On en riait après, plus tard, quand tu venais m'avouer ton sentiment de culpabilité d'avoir dragué quand ton homme t'attendait là bas, distant de milliers de kilomètres et de quelques mois.
J'ajoutais en riant qu'en plus d'avoir manqué le tromper c'est un coup que tu m'avais grillé -pour au final t'en dégager avant d'aller trop loin, par respect et fidélité pour ton copain, tous ces aimables lien qui ne me concernaient en rien.

J'aurais pu t'en vouloir, te traiter d'allumeuse et de salope. J'aimais mieux en rire et me dire que ce n'était pas plus mal que cela t'arrive avec moi qui riait de ces coups bas involontaires et me moquait bien de conclure.


Et puis tu m'avais sauvé quelques fois la mise et la soirée, parfois même sans t'en apercevoir comme tu ne t'apercevais pas me piquer mes conquêtes. En attirant à toi l'attention de l'un qui me gonflait, d'un autre choisi par défaut, quand je ne souhaitais d'une soirée qu'un peu d'amitié et de partages.

Tu me disais dure en amours, comme on le dit d'autres en affaires. Tu te félicitais sincèrement de mon bonheur quand je pensais avoir croisé enfin quelqu'un de bien. Mais c'était rare et en attendant tu me disais profite, on ne vit qu'une fois, profite d'autant plus que tu n'es pas engagée toi.
Je souriais, tu savais bien comme moi que tout cela ne marchait jamais tout à fait comme ça.
Tu avais besoin de séduire qui que ce soit pour être rassurée, séduisante et le savoir. Je ne savais pas me contenter sans arrière-pensée d'un coup d'un soir quand il ne me plaisait pas tout à fait.

Vrai que tu lui en as fait voir à ton homme resté là bas, tandis que tu t'éclatais avec -plus que ?- moi.
Mais j'espérais qu'il pardonnerait, qu'il comprendrait aussi tes repentirs que je savais sincères.
J'espérais car comme toi je savais que c'était lui, que c'était toi, que vous formiez le couple le plus improbable et pourtant le moins voué à voler en éclat. Vous étiez de ceux assemblés pour convoler et durer.

Tu me faisais rire en me racontant vos débuts, quand tout n'était parti que d'une histoire d'un soir et convenue. Vous saviez que cela ne durerait pas, attendiez simplement que l'autre se charge des premiers pas d'une rupture attendue.
Et puis ça a tenu.

Et puis tu es partie -en géographie seulement, car ni de ses pensées ni de votre relation- et revenue et les liens non seulement perduraient comme s'ils ne s'étaient jamais distendus mais bien plus s'étaient ravivés, enrichis. Avaient mûri.
Aujourd'hui vous signez l'achèvement ou le consentement de leur valeur et leur solidité. Il est évident que je viendrai.

Je m'habillerai et parlerai bien, n'ai crainte même si je sais bien que tu n'associes ni mes mots ni mes parures au satin. Tu seras peut-être surprise de me voir entrer si bien dans les codes attendus. Non, je n'aurai plus ces grosses bottes à crampons qui accompagnaient tes talons. Je mettrai bien en valeur selon les codes et les usages attendus ce corps pourtant loin des modes et tout en déconvenues.
Je sais bien n'être pas mignonne ainsi, voilà bien pourquoi c'est autrement que je séduis ou le tente du moins, un peu plus camouflée sous quelques airs de garnement.

Mais qu'importe après tout puisque je ne viendrai pas tout à fait pour être jolie. Pas plus que pour être polie mais bien pour toi, pour la joie mon amie.

Je devine déjà que tu me placeras à la table des élibataires où s'échangeront sans doute un peu de regards et de séduction, quelques numéros voire un peu de passion.
Qui sait, peut-être entrerais-je à l'hôtel accompagnée. Je doute pourtant fort d'en sortir ainsi, de construire avec un, avec lui. Ne t'avise pas de jeter en ma direction l'inévitable bouquet que je me chargerai bien d'esquiver. Nul besoin à dire vrai, tant il sera de mains pour le vouloir et l'ôter prestement de mon chemin.

Ma belle si tu savais la joie que m'apporte ici et aujourd'hui la réception de ce carton. Joie pour toi, sincère et sans jalousie.
Je ne suis pas tout à fait de tout ça, j'en ai pris le pli à défaut d'en avoir vraiment fait le choix.
Qui sait, peut-être resterais-je encore un peu là bas, certainement retournerais-je faire signe aux miens. Peut-être même arrêterais-je pour de bon, trouverais-je cette fois-ci le bon...
Mais il est plus probable que je reprenne en fait le chemin du tarmac et des tropiques où je retrouverai le hamac et sa place unique. Et puis qui sait peut-être un jour tout cela finira bien par changer.
Ne t'en fais pas pour moi, j'ai pris le pli à défaut d'en faire vraiment le choix. Parti(e) de vie ?