Jours froids
Instantanés - Par Gabrielle - samedi 13 avril 2013 - Lien permanent
Il y avait des jours comme ça. Des jours où tout lui semblait
glauque et froid.
Elle avait pourtant pour
habitude d'aimer la vie, d'en jouir et puis d'en rire. Elle s'amusait
du quotidien, d'un rien, s'émerveillait d'encore moins. Riait sans
cynisme, souriait tout en prismes, décomposait les emmerdes au
regard des merveilles.
Et puis il y avait ces
moments tristes. Il suffisait parfois de peu, une situation ou un
aveu. Tout lui semblait noircir, s'enlaidir.
Souvent cela relevait-il
effectivement de quelques événements, complexe mélange en affreux
contexte.
Elle se sentait de trop,
elle se sentait trop haut.
Bien sur orgueil et
préjugés, bien sur écueil en vanité.
Dans ces moments
méprisait-elle, dépréciait-elle ceux là qui lui semblaient si
bas, aussi étroits. Leurs esprits lui semblaient étriqués, centrés
en quelques idées éculées, les lieux communs s'y faisaient
quotidiens. Il suffisait de quelques uns, quelques instants pour la
dégoûter bel et bien des gens. Leur médiocrité l'assaillait,
l'envasait.
Bouche close elle offrait
alors d'infime sourires aux doses établies sur ses paies. Elle souriait à hauteur
du contrat, rêvant tout bas de leur briser la voix. Qu'ils la
ferment et cessent de blatérer. Qu'ils s'enferment, déjà entravés.
Leurs petites vies, leurs
problèmes infinis. Mais surtout l'assurance avec laquelle ils en
avancent, des sottises et conneries.
Ils suffisaient, pourtant
de peu, se suffisaient d'être mauvais. Suffisance de leur
insuffisance. Celle là l'exaspérait, sans la moindre humilité.
Leur simple connerie
l'aurait faite hurler mais c'était bien pis quand ils prétendaient
lui apprendre la vie. A coup de banalités éculées, de lieux
communs à gerber.
Elle savait, tout en
refrénant l'idée de son poing dans leurs dents, n'être après tout
pas mieux, ne pas appartenir au clan des brillants.
Pis, faisait-elle aussi
et d'autant plus en ces moments, partie du clan des suffisants. Elle était mauvaise et
sa prose empestait pourtant d'aise.
Pis, elle était sensible
et s'était juré l'impossible d'aimer tant qu'elle pourrait le monde
et ses effets. L'humain aussi même si ce domaine était un peu moins
facile à aimer sans avoir un peu parfois à se forcer. Elle était
celle qui souriait, qu'un rien émerveillait.
Et parfois le monde était
de trop, l'humain la muait en sanglots -tout ça craint, pensait-elle
un peu mélo. Et la médiocrité lui sortait par les yeux, et leur
ressembler lui filait une peur bleue.
Dieu, le destin ou les
miens, ne me laissez pas m'égarer en chemin.
En ces jours où la
médiocrité lui semblait sourdre et l'inonder de ceux qu'elle devait
fréquenter, auxquels il lui fallait se confronter, en ces jours
abêtissants la solitudes appuyait son doigt puissant en ses côtes
et torturait ses chairs à l'ongle habitué. Ou frappait à la
machette, envoyait des hachettes.
En ces jours et la
solitude et la médiocrité -de ces autres, étalée à leurs pieds,
et la sienne, éventée par ces mêmes idées- l'enlisaient,
l'envasaient, lente écoeurée.
Ecoeurée, gagnée par la
nausée d'eux et d'elle même en la perte de cette humanité. Tous ne
sommes nous que des pantins d'orgueil et suffisants bouffis jusqu'au
temps du cercueil.
Il n'est nulle fuite et
nul espoir d'une suite un peu moins noire.
Commentaires
http://cribas.fr/post/2008/01/15/Ce...
Ne pas sortir de l’ornière. Sans cesse en contact avec les chemins tracés par leurs œillères. Etre usé n’est pas une décision, mais ils se passeront tout de même de toi. Laisse dire, laisse faire, laisse les flatteurs à leurs flatteries pour la survie. Laisse.
Ne leur fais pas le plaisir d’exprimer ta rage. Ils sont bien. Ils n’en veulent pas. Ne fais pas ton rebelle, tu ne seras que le roi des cons. Ils couronnent les miroirs afin de se supporter. Aveugles.
Cherche ailleurs. Ignore. Sans cracher. Laisse.
Passe le temps en te serre-joints de véritables amis. N’accepte que la critique, pas la confusion arithmétique du besoin de contredire sans méthodes saines.
Existe seul afin de concevoir ta propre vie. Fais du tort à ta médiocrité.
Sublime ! Polis tes qualités premières en exigeant de toi de ne pas sombrer dans la sémantique des politesses de masse.
Ecarte ton chemin. Ne roule pas dans les méandres mécaniques.
Assieds-toi dans le ravin. Ecoute l’observation de ton silence ébruité, il n’est plus anodin.
Regarde ! Les moteurs explosés jonchent l’ornière des destins macabres.
Ne file pas plus vite qu’à la vitesse d’un homme.
Ferme tes yeux mous, écoute.
Tourne le dos ! Traîne !
Les derniers instants se méritent.
Le dernier instinct est une invitation subsidiaire à vivre sa vérité en une seule fraction de seconde…
Sinon ça recommence…
Sinon ça recommence…
L’humanité est parfois longue à se détendre.
Cribas 15.01.2008