Tout est bon pour rester. Pas de raison trop petite, ridicule ou futile. Tu peux reporter le désir de tout envoyer balader, juste le temps de finir un bouquin, d’attendre la sortie d’un nouvel album ou la prochaine soirée samedi. Pour espérer croiser encore le joli sourire du voisin, pour voir si ce début de flirt ira plus loin.

Y’a rien de ridicule, rien de futile à t’accrocher à de petits riens. A ne t’accrocher qu’à de petits brins. En atteindre un et puis viser le prochain. Pas après pas, chaque jour son appât. Son combat.


Il y a mille et tant de raisons pour sembler te noyer, de pourquoi et d’envies de renoncer.

Aucune qui ne soit, qui ne puisse pas être vraie. Le monde qui semble laid, la moitié qui s’est barrée. Le gagne-pain qui vous brise les reins ou l’enfant qui s'éteint. Autant de raisons de renoncer que de gens pour y penser. Que de jours où tout lâcher.


Alors autant d’arguments pour continuer. Autant de dead-lines et d’agendas. Jusqu’au diplôme, à l’anniversaire ou au dîner. Y’a pas de délais, pas de quotas.

Tu peux te trouver des raisons pour la journée. Déraison paye ta tournée. Et si c’est bon fait tourner.

On en a des conneries à raconter, des échanges et de l’amour à donner. Si c’est pas aujourd’hui ce sera pour demain. C’est de la bonne came, ce qu’il y a en toi, ça ne se périmera pas.


Et si, là, t’envisages rien, si ça reste couvert à l’horizon où ne se dessinent que les mêmes poisons… Reste à courber la tête, faire le gros dos et laisser, si possible et besoin, couler les soupirs, les sanglots. Ou le vide, si c’en est à ce niveau. Passer l’averse vaille que vaille, même si tu ne sais pas bien où aller, même si aucun soleil ne semble se décider à pointer.

Faire un pas après l’autre, aussi pénibles soient-ils. Aussi futiles semblent-ils. Avancer, même à la journée, c’est déjà progresser, même si tu n’envisages pas la fin de la fosse à purin.


Tu trouves le courage de la journée dans le bonjour du voisin, le soleil qui revient et le prochain boss d’un jeu vidéo. C’est assez. C’est déjà bon, suffisant pour le mériter.


L’un dans l’autre on fait toujours le gros dos sous l’averse ou le froid, persistant sans plaisir jusqu’au retour des beaux jours. Et tu se surprends parfois, même au coeur de cette purée de poix, à trouver de quoi te faire sourire. Ca devrait suffire jusqu’à la prochaine fois.


Les hirondelles reviennent chaque année. L’envie d’aller, ça peut traîner. C’est pas figé sur le calendrier. Faut parfois serrer des dents longtemps dans l’hiver qui ne semble jamais finir. Les arguments s’étiolent avec le temps. Au point parfois d’en manquer de ne plus savoir vraiment si rien de tout cela reste pertinent.


T’es pas obligé d’y croire pour le moment. T’es pas obligé d’être persuadé que la vie redeviendra ensoleillée. T’es pas obligé, là tout de suite, d’avoir cette force là, cette foi là.

On l’a pour toi. On l’a pour toi quand on écoute tes maux, quand on brocarde tes mots. Quand on te sort ou qu’on te cause. On l’a pour toi cette foi là. T’éreinte pas à la chercher, à faire semblant de la posséder.


T’es pas obligé de croire au printemps pour qu’il finisse pas arriver. Pas obligé de croire en la fin de la vallée pour en déboucher. Tu peux marcher en fixant tes pieds. Te croire damné, condamné à errer pour l’éternité. Et puis un jour un parfum, un jeu de luminosité jouera peut-être du sien. Te fera lever la tête sur les plaines ensoleillées. Alors peut-être que tu recommenceras à y croire. A croire que t’y as droit, que t’en es capable et que ça aussi c’est pour toi.

D’ici là, serre les dents et les coudes avec nous. A défaut de la partager, on peut porter la foi pour toi.