L'appel en veilleuse
Instantanés - Par Gabrielle - jeudi 7 septembre 2017 - Lien permanent
Reviennent l’automne et le froid. Les grues volent bas. Tristesse étrange à nouveau qui m’envahit avec une férocité poignante. Oh poitrine serrée ! Incertitudes d’où aller.
Nez au vent, humant l’horizon, l’espace qui s’infiltre sous la narine au-delà même des pupilles et trouve sa voie jusqu’à l’inconscient. Trouve sa voix jusqu’à l’intérieur où résonnent les émois.
Explosion, implosion, hors de soi. Sans colère, non, mais perdition.
Impression étrange d’un dehors qui tirerait, aspirerait, ferait pression sur le dedans. Sentiment de n’avoir que la peau fine, peinant à contenir ce qui explose en dessous, voudrait s’échapper par tous les pores, toutes les issues. Noeud d’issues, plus terrible encore que leur absence qui m’a toujours été momentanée. Noeud d’issues. Dire, faire, parler. Rire, taire, pleurer. Tout déborde et tourbillonne, s’enchaîne et se fond, vrille sans jamais prendre forme.
Sentiment d’étrangeté, d’étrangéité. Eloignement du réel et de l’instant. Voix qui appelle, juste au-delà du tympan.
Revoici l’automne et l’appel. Les jours s’éteignent et marquent une veilleuse en l’esprit, qui brille faiblement, mais solidement. La veilleuse, qui ne brille pas dans l’éclat et le bruit. Qui s'éclipse au zénith et ne cesse pourtant jamais de briller. Que viennent l'heure seule et l'heure sombre, que vienne l'automne et la voilà qui irradie, rappelle à soi. Celle qui tient, présente en tous temps. Qui se rappelle à l’esprit humant le vent. La veilleuse. Celle qui tient. Qui dit le temps. Qui dit l’espace en le disant. Qui appelle et qui tire, sans jamais se définir.
L’ailleurs. Le mouvement. La fuite en avant. A l’automne, je reconnais dans mes éternels désirs de départs une part de fuite informulée. Tout plutôt que rester !
L’ailleurs pour y penser, ne pas avoir à se trouver. L’ailleurs sans y rester, l’ailleurs pour d’être plus où l’on est, d’où l’on est. L’ailleurs est un suspens permanent. L’ailleurs est en suspend permanent. Un bond d’où l’on sait que l’on retombera, un pays où l’on reviendra. Mais pas maintenant. Un bond fuite en avant pour n’être pas tant que ne plus être où l’on était. Qui l’on était. Ce que l’on. Quitter la ville ou le pays comme un habit et comme une envie. Radical et urgent. Jamais permanent.