Le jour s’endort et les envies s’éveillent. Vienne la nuit, je me meure. Tombent les feuilles, sonne l'heure. L’automne apporte son étirement, un allongement des ombres et de l’être, tendu au firmament. Il y a l’horizon sous les nuages et le vent. L’humidité transperce et lui permet de passer. D’insuffler au plus près, où le froid vient déjà s’immiscer d’après l’été. Désirs d’extériorité. La peau hérissée, c’est le froid dont on n’est pas encore couvert, c’est le toucher exacerbé qui gonfle et paraît tout fondre et traverser. La peau dit son envie de se frotter à d’autres ailleurs, d’autres bises et d’autres chaleurs. L’annonce de l’automne est une envie d’ailleurs. Le soleil a pâli et semblerait rieur, ou malade. Difficile à dire de si loin. L’annonce de l’automne est un appel au loin. Le bruit du train, familier et lointain, qui fait vibrer différemment. Rappelant moins sa présence que son sens. Un écho, qui dit la distance qu’il invite à parcourir. En automne, le monde rappelle son immensité. Rappelle à son infinité. Appelle à ses capacités. L’annonce de l’automne est un appel de fin, une respiration dans la partition. On respirera de nouveau. Ailleurs. Plus loin. C’est un cycle achevé, qui appelle à déplacer. Non pas renouveler. Une roue qui a tourné, non immobilisée, pas tout à fait mais déclinante désormais. Cela passera. Mais l’automne soulève chaque année l’immobilité. Le renouveau qui n’a pas été. Le cycle recommencé. Il faut sans doute s’en réjouir ou s’en contenter. Ou le fuir et toujours recommencer. Il faut sans doute tenir, aimer vivre et rester. Mais l’automne appelle à s’en rappeler. L’automne est une question posée. L’été va de soi, écrase de lumière les questions derrière. L’été écrase la veilleuse sous les rayons dardés. Laisse peu de place à l’ailleurs et l’immensité. L’été est une immédiateté, une intensité. L’automne assombrit les jours et rallume en leur coeur. L’automne est une veilleuse allumée. L’automne est, plutôt, l’obscurité qui la permet. Moins d’exister que de briller. Eteint la luminosité, laisse les ombres s’exprimer. Et la veilleuse les façonner, les animer. L’automne endort le jour et réveille l’envie. Parfois très loin, enfouie l’envie, l’envie en vie c’est certain. Elle s’étire au crépuscule de l’été. Avec l’été meurt une certaine légèreté, qui rie d'irréflexion. Pluies et potirons, je demeure. L’automne a la lourdeur de la terre mouillée, des ciels plombés. Qui attire au sol et lève les idées. Enlève les idées. Les fait s’élever, cerf-volant de pensées. Les migrateurs déjà lissent leur plumes et savent bien. Que l’automne est saison de s’en aller. Les pensées les suivent enlacées, fils d’araignées au vent jetés.

Automne. L’esprit tend des échelles aux hirondelles.